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6/03/2022 : Belles tentations
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Prédication du 17/06/2023 par le pasteur Marc LABARTHE
Luc raconte l’histoire d’un jeûne de Jésus de 40 jours dans le désert, en 13 v, très proche de celle que Matthieu rédige, en 11 v. Alors que Marc est des plus laconiques, puisqu’il n’a que deux courts v. ; et Jean oublie tout simplement cet épisode de la vie de Jésus, ou l’ignore. Dans les trois Ev. synoptiques, le jeûne de Jésus dans le désert vient après la tendre déclaration de l’Esprit de Dieu à Jésus nouvellement baptisé : Tu es mon Fils bien-aimé ; c’est en toi que j’ai pris plaisir (Lc 3.22). Et cette affirmation est primordiale.
Jésus est assuré d’une relation unique et précise avec Dieu, qui est son père, et qui le confirme et le manifeste pleinement par le don de son Esprit. Et c’est ce que devrait pouvoir signifier le baptême pour tous ceux qui demandent le baptême : une relation privilégiée avec Dieu, une intimité avec le Seigneur que Dieu lui-même assure. C’est à partir de cet événement et de cette révélation de Dieu à Jésus, qu’il est pleinement et véritablement son fils, que les 4 évangiles font démarrer le ministère de Jésus.
Dit autrement, Jésus ne démarre pas son oeuvre parmi les humains sans avoir reçu cette pleine assurance de l’amour de Dieu pour lui, pour son parcours avec et pour les humains.
Or, aussitôt que Jésus arrive dans le désert, un autre personnage l’y accueille. En Luc et en Mt, il s’agit du diabolos, le diviseur, celui qui sépare. Alors que chez Mc, il s’agit du satan, l’adversaire. C’est une subtilité pensez-vous, mais cela indique la manière dont chaque écrivain a compris ce qui s’est passé dans le désert, tout comme cela colore autrement chacun des évangiles.
Luc nous dit que le diable est là et tente Jésus pendant 40 jours. Tous les jours sont donc concernés par des échanges entre Jésus et le diable : pas un jour sans tentation ! Jésus est porté par les paroles de l’Esprit saint : Tu es mon Fils bien-aimé ; c’est en toi que j’ai pris plaisir. Sans bible de poche, ni de smartphone avec une bible, il n’avait que sa mémoire des passages appris à la synagogue, pour y puiser des versets qui illustrent ce plaisir de Dieu en lui. Or, c’est au terme de la quarantaine, qu’un événement provoque l’agression du diable à l’encontre de Jésus. En fait, je ne devrais pas dire « agression », mais proposition, solution adéquate. Car, étrangement, Luc nous dit que c’est au bout de cette quarantaine, que soudain, Jésus a faim.
Il y a urgence : 40 jours sans manger, c’est la mort s’il ne prend pas quelque chose. Il a perdu 10 ou 20 kg, pour le moins. Il n’est plus aussi fringant qu’à son arrivée ! Et ce que propose le diable, c’est d’aider Jésus à trouver sa nourriture. Ce n’est pas quelque chose qui vient détruire Jésus. La parole du diable, la tentation n’est pas quelque chose de désagréable ! bien au contraire, elle vient répondre à un besoin vital, essentiel ici, de l’être humain.
Et le diable, pour Jésus comme pour nous, s’appuie sur ce qui semble le plus évident, sur la proximité que Dieu lui-même a donnée à Jésus : Tu es mon fils bien-aimé. Et le diable dit, « si tu es le fils de Dieu« , alors quoi… n’es-tu pas maître de la création, toi fils du créateur ? et donc tu peux l’exploiter à ton profit, pour ton bien, pour satisfaire tes besoins essentiels et bien davantage ! tu as faim après ce long jeûne, procure-toi un sandwich ! Tu as tous les pouvoirs ! tout ce qu’il faut devant toi !
F&S, ne regardons pas les tentations proposées à Jésus -ou les nôtres- comme des épreuves angoissantes, qui cherchent à nous étouffer. Elles n’ont rien à voir avec l’inadmissible, ni avec une volonté de détruire, au contraire : ce que le diable propose à Jésus est proche de ce que nous pouvons nous-mêmes imaginer faire, au nom de Dieu, pour notre bien, et le bien de l’humanité.
La 1e tentation de Jésus, est d’obtenir ce qu’il veut (du pain), ce dont il a besoin. Il est dans le désert pour construire sa relation avec Dieu et se préparer au ministère. Mais son autorité de fils de Dieu n’a pas à emprunter de compétences magiques à son seul profit – même au risque de la mort. Il est venu apprendre ce discernement, en jeûnant et en priant, entre désirs et besoin, et méthode pour y parvenir.
La 2e tentation est de se prosterner devant le pouvoir : le diable dit bien de manière effrayante, toute autorité m’a été donnée et je la donne à qui je veux. Et c’est bien ce qu’il fait – il suffit de regarder autour de nous : La soif de pouvoir et d’argent, de contrôle et d’exploitation des autres est endémique dans le monde d’aujourd’hui comme celui d’hier. Il n’y a pas que Poutine, Trump, JiPing ou Erdogan, ni les caïds terroristes ou ceux de la drogue qui s’inclinent devant ce diable-là. Il n’y a pas que Big pharma, ou Gafa virtuels, ou les média papier à se soumettre, au nom du soi-disant bien-être apporté à tous. Car à l’inverse, le refus de résister, la peur de résister, est une manière de se soumettre au pouvoir du Diviseur et de ceux qui le servent. Il n’y a pas de neutralité possible dans ce domaine, mais, un choix de suivre ou pas, le chemin qu’a suivi Jésus. Et nous savons que c’est un chemin qui souvent passe par Golgotha.
la 3e proposition du diable vient appuyer la volonté humaine dans ce qu’elle a de plus intime, depuis les origines : devenir comme des dieux. Le diable utilise une parole de Dieu pour justifier un comportement tout à fait révélateur du coeur de l’humain. Jouer Dieu contre Dieu ! Un jeu biblique que raffolent les chrétiens entre eux, lorsqu’ils se jettent des v. à la tête, chacun marquant des points contre l’autre pour asseoir sa vérité, son autorité, son église. Et les protestants sont passés maîtres en l’affaire, même s’ils sont, depuis, dépassés par les Evangéliques. Le diable est aux anges !
La citation que Jésus utilise dans sa réponse, n’est pas pour s’affirmer en opposition au v. produit par le diable. Mais la parole reprise signifie un abandon du combat : Jésus n’entre pas dans le jeu biblique du diable. Alors ce dernier s’éloigne jusqu’à une autre occase.
Les 3 propositions du diable vont toutes dans le sens de nos attentes, elles flattent notre égo, notre orgueil, notre besoin de survie, de domination, d’être reconnu. Et Jésus ouvre une autre voie, qu’il suivra tout au long de son ministère. Il refuse d’exploiter à outrance la création minérale ou végétale pour le seul profit personnel. Il ne conteste pas l’autorité ni le pouvoir diaboliques, mais choisit la méthode de Dieu de gouverner le monde, dont les lois n’écrasent pas et n’excluent aucune espèce : servir toujours. Enfin, il se reconnaît limité et faible comme tout être humain, et ne cherche pas à montrer que son état de fils de Dieu lui donnerait carte blanche. Jésus nous montre un chemin qui demande des renoncements, du jeûne, du discernement. Et nous avons encore à apprendre !