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31/10/2021 : Ecoute et Aime
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Prédication du 17/06/2023 par le pasteur Marc LABARTHE
Le passage de la lettre aux Hb explique en quelques points, pourquoi le ministère de Jésus est radicalement nouveau par rapport à celui des prêtres et des sacrifices sans cesse répétés par le système clérical, parce qu’il fait disparaître tout cela. Au XVIe, Martin Luther a réactualisé cette même affirmation, en dénonçant le pouvoir des prêtres sur le peuple par un contrôle de leur vie grâce aux indulgences et au sacrifice réinstitué de la messe. Aujourd’hui, le rapport de la CIASE provoque une déflagration semblable en révélant la dérive systémique de l’église romaine. Mais il n’y aura pas de changements en profondeur.
Dans l’év selon Marc, l’échange entre Jésus et le théologien n’a rien de polémique. Ce dernier constate que Jésus a de la répartie, et qu’il s’appuie sur les Ecritures avec une bonne sagesse. Cet échange au sujet du premier commandement de la Torah ne montre pas un Jésus agressif contre la Loi. Alors que selon Mat, Jésus est assez pointilleux dans le sermon sur la montagne d’une part, lorsqu’il dit « vous avez appris, mais mois je vous dis », et dans la reprise de cette même rencontre entre Jésus et le théologien, au ch.22,34ss, où cet homme tente de piéger Jésus. Selon Luc, c’est aussi un piège, et qui est même prolongé par la demande d’éclairer qui peut être mon prochain (10.25ss), et la réponse de Jésus raconte la parabole du Samaritain.
Rien de toute cette ambiance polémique chez Mc. Au contraire, même. Le théologien veut confirmer pour lui-même qu’il a bien compris que Jésus est un assidu des Ecritures, fidèle à ce qu’elles enseignent, alors il interroge sur le coeur de la Torah, la parole la plus forte, le commandement qui est au-dessus de tous les autres.
Si je vous demande la même chose, quel est le passage le plus important pour vous, dans la bible, le verset qui pourrait résumer à lui seul le coeur du message biblique, le coeur de la parole de Dieu, que diriez-vous ? Jn 3.16, Ps23 mais pas Dt6.4
Pour le peuple juif, la toute première parole est celle de la confiance, de la foi, la relation que Dieu établit entre lui et le peuple. Et tout juif vous répondra que la toute première parole que Dieu adresse à son peuple, c’est le « shema« , le « écoute » : shema israël adonaï elohénou adonaï ehad.
Le 1er des commandements n’est pas tu aimeras Dieu ni tu n’auras pas d’autre Dieu. C’est une erreur de notre part, une mécompréhension du judaïsme. Et à cette question, Jésus ne se trompe pas ! Jésus répond comme n’importe quel juif croyant aurait répondu, hier comme aujourd’hui. Shema Israël ! Ecoute ! Jésus est un juif complet, et cet échange avec le théologien en est la plus belle démonstration. Le premier des commandements ? Ecoute ! Ecoute le Seigneur, lui seul, il est un, il n’a qu’une parole, il est sa parole.
Nous devons nous aussi, entendre que le 1er commandement, ne commence pas par la phrase « tu aimeras le Seigneur », mais par une autre intention : Ecoute le Seigneur Un. Ce n’est qu’après l’écoute, que l’amour peut surgir. Cela nous semble peut-être normal, habituel, d’écouter le rappel du commandement, mais le fait d’écouter, pour s’entendre dire qu’il faut écouter, avant d’agir même par amour, voilà qui peut vraiment nous aider à cheminer de manière nouvelle dans notre foi, dans notre église, dans notre monde. Une invite à nous réformer !
Car écouter, c’est faire attention à l’autre, à ce qu’il dit, à ce qu’il est aussi. C’est prendre le temps de le comprendre et non pas de lui imposer nos idées. Et si en plus de l’écouter, je dois ensuite l’aimer, c’est bien autre chose que de l’obliger à obéir à mon point de vue. Ecouter, c’est un a priori de confiance, c’est accepter que le vis-à-vis a quelque chose à me dire et que je peux et même dois prendre en compte. Et là, ce que me dit Celui que j’écoute, c’est de l’aimer, lui, et d’aimer aussi mon prochain.
C’est une déclaration très simple et familière. Elle faisait partie de la prière quotidienne de ceux qui entouraient Jésus. Avec cette réponse, Jésus s’inscrit dans la tradition d’Israël, au même titre que les pharisiens et les sadducéens avec lesquels il polémiquait souvent. Jésus dit que la règle la plus importante est qu’ils doivent écouter et aimer Dieu par-dessus tout et avec chaque fibre de leur être, et traduire cet amour envers le prochain. Et le théologien reprend tout cela à sa manière, et ajoute une conclusion surprenante : agir de la sorte, c’est bien plus que les sacrifices et les holocaustes ; aimer le prochain c’est bien plus important que les rituels religieux ou sociétaux ; aimer Dieu c’est bien plus important que les cultes et les messes.
Ce que le théologien ose dire tout haut, c’est qu’écouter Dieu, aimer Dieu, aimer son prochain, ce n’est pas aller à l’église, ce n’est pas obéir au prêtre, ce n’est pas accomplir le rituel religieux par obligation, culpabilité ou habitude. En disant cela, il vient casser le système de contrôle instauré par le clergé et qui soumet le peuple à des contraintes qui ne sont plus celles de l’amour du prochain ni de Dieu. Il est ainsi proche du RD. Pour y entrer, c’est par l’accueil de JC comme celui qui met un terme définitif au système sacrificiel comme Hb le décrit. Un lourd silence survient alors, plus personne n’ose parler.
Qu’est-ce à dire ? ce silence est-il réprobateur, regards noirs sur le théologien qui vient fragiliser le système ? ou ce silence est-il celui d’une écoute renouvelée ? Or le silence est la première réponse appropriée à l’amour radical auquel nous sommes appelés. Nous ne devrions pas parler d’amour avec désinvolture. Nous ne pouvons pas le rabaisser à un sentiment émmotionnel ou une forme de piété. Nous devons nous rappeler que dans les Écritures, l’appel à l’amour est un appel à la vulnérabilité, au don de soi et à une forme de souffrance. C’est un appel à porter sa croix et à déposer notre vie. L’amour biblique n’est pas cantonné à l’émotion que nous ressentons, c’est un chemin que nous parcourons. En tant qu’enfants de Dieu, nous sommes appelés à marcher dans l’amour.
Et cette marche nouvelle, qui part du silence parce que le silence est avant tout une écoute, nous conduira bien sûr à rencontrer d’une part Dieu dans la prière, le chant, l’écoute de sa Parole, et d’autre part à servir le prochain jusqu’au don de soi par amour-agapè. Les conséquences de cette réforme de notre écoute dans l’amour reçu et partagé conduiront à changer nos vies d’église, comme les apôtres après la Pentecôte, comme les réformateurs au XVIe. C’est aussi une forme de bouleversement qui nous atteint et nous pousse à changer au plus profond de soi, vers un jaillissement renouvelé des relations, avec amour.
Prenons le temps du silence et de l’écoute. Demandons la grâce d’être reconnaissants et d’aimer comme le Christ nous a aimés, dans nos famille, notre église et village/ville.