Marc 1, 21-28         1 Cor. 7, 32-35

Cette histoire d’evangile est bien connue, prêchée plusieurs fois par année. Nous l’avons travaillée sous trois formes dans la vidéo diffusée ce matin à ceux qui ont internet (à retrouver ici:) Donc quelques répétitions.
Je déplace cette histoire au 21e s. et dans notre contexte chrétien, pour éviter d’abord tout antijudaïsme que le texte n’a pas. Ensuite parce que nous devons entendre ce passage comme répondant à notre actualité, aussi bien mondiale que locale. Souvenons-nous de ce que Marc nous raconte :

Jésus a reçu son baptême par JB, est adoubé par Dieu comme son fils, il a séjourné au désert, se lance dans la prédication du RD, et sur son chemin au bord du lac de Galilée, appelle 4 hommes à devenir ses disciples. Puis, entrés dans la ville de Capernaüm, ou celle où nous sommes, le dimanche Jésus s’en va au temple ou l’église. Il enseigne, et son discours frappe les personnes présentes, par l la puissance qu’il dégage. Son enseignement tranche avec celui des prêtres ou des pasteurs.

Aussitôt, un homme dans un état d’esprit toxique, vocifère contre lui : que nous veux-tu, Jésus le nazaréen – tu es venu pour nous détruire – je sais qui tu es, l’élu de Dieu. Jésus répond à l’homme du tac au tac : cesse de hurler, et sors de ta cage. Alors l’esprit toxique secoue l’homme et se dégage en poussant un grand cri. Toute l’assemblée est tétanisée et se dit qu’il y a là un enseignement nouveau dont l’autorité subjugue même les esprits toxiques.

Et aussitôt sa réputation se répand comme une trainée de poudre dans toute la région — Drôme-Ardèche ou Auvergne-Rhône-Alpes.
Les premiers disciples de Jésus sont avec lui, ce jour de culte dans le temple. On ne les reverra qu’à la sortie. Ils sont les temoins directs de l’autorité puissante de ce Jésus qui les a fait sortir de leur routine, de leur métier, de leurs habitudes. Et ils seront porteurs du même message d’autorité, à diffuser lorsque Jésus les enverra.

En attendant ce jour, Jésus vient rencontrer l’église là où elle se rassemble pour son culte. Chaque dimanche, c’est là que la parole de Dieu est annoncée par les pasteurs et prêtres, qui sont « scribes » en la matière – spécialistes en Ecritures. Si l’orateur est bon, l’église sera pleine, et c’est bon pour les finances. La parole prêchée doit assurer un peu de bien-être, mais quant à changer le cours de l’existence, c’est pas conseillé.…

Ce matin-là, selon Marc, Jésus a RDV. S’il fait le « buzz » par son discours avec les membres de l’église, et que le nombre de ses « followers » se multiplie par la suite, ce qui importe pour Jésus est cet être humain qui lui fait face. Nous ne le connaissons pas; homme ou femme, prêtre au pasteur, un conseiller, pourquoi pas ; il est là, comme s’il représentait à lui seul l’assemblée réunie. Car une fois libéré, cet humain disparaît de la cène; il ne reste que l’assemblée, qui reconnaît qu’un changement radical vient de se produire.
Marc nous dit qu’il est dans un mauvais esprit. Et c’est assez subtile pour qu’on en tienne compte. Loin d’être ligotté par le démon, l’humain est dans un mauvais esprit, il est dans un état d’esprit négatif, pire, toxique. En quelque sorte, l’humain se cache dans cet esprit comme dans un cage protectrice. Si quelqu’un s’approche d’un peu trop près, il reçoit une belle décharge électrique. La personne au comportement toxique peut arriver à déstabiliser toute une communauté, à la faire éclater en clans, à briser la confiance, à paralyser toute vie et tout avenir de l’église, en la mettant sous sa tutelle.

Jésus enseigne : le moment est venu, le RD est proche, il est temps de changer de registre et d’avoir confiance en la nouveauté de vie (v15). Ses paroles qui autorisent chacun à se laisser saisir par la bonne nouvelle et en tirer conséquence dans sa propre existence, provoquent un onde de choc inouïe, une notoriété du prédicateur qui va déranger celles et ceux qui veulent garder le contrôle et le statu quo des pouvoirs en place.

L’humain pris dans son esprit toxique a tout de suite compris les conséquence de message d’autorité : Jésus vient déstabiliser la vie de l’église, il secoue la routine tranquille du système protestant ; intolérable ! de ne plus avoir les liturgies classiques ; impossible, de vivre libéré des contraintes morales de la religion. Que nous veux-tu, Jésus ? Je sais bien qui tu es, le « saint » de Dieu ! et si vous dites cela dans l’esprit toxique, ce n’est pas de l’admiration, mais le pire mépris qui soit : tu te prends pour qui devant nous ? le «  » »saint » » » de Dieu ?

Devant la brutalité de l’agression verbale, Jésus répond du tac au tac: il fait taire les récriminations. Puis il libère l’homme de son état d’esprit toxique, ce qui ne va pas sans cris de colère devant la perte de son équilibre, ou cris de panique devant le vide misérable qu’il présuppose ; parce que la liberté de penser autrement, la liberté d’ouvrir la porte au RD, provoque un véritable appel d’air. Et cette bourrasque vient déséquilibrer tout parcours bien huilé, elle peut provoquer le refus et le rejet de cette autorité, jusqu’à chercher les moyens de la détruire – comme les scribes, ou de la canaliser sous son contôle.

Mais cette bourrasque assure aussi une bouffée d’air pur, de senteurs chaleureuses et réconfortantes, qui donne enfin du sens et de l’espérance à la vie. Accueillir le RD et y entrer à la place du mauvais esprit, vient chasser l’état d’esprit toxique, libérer la tradition immuable et stérile. Le Règne de Dieu met des couleurs dans le quotidien, il met du relief sur tout négatif, il détourne le regard mauvais et assèche les paroles stupides sur les autres quels qu’ils soient. Le Règne de Dieu autorise la vie, autorise des relations de confiance, il autorise un chemin de découverte d’une bonne nouvelle apaisante et heureuse.

Jésus vient précisémment dans nos espaces bien cadrés, où nous avons placé le coeur de notre équilibre de vie. C’est là que sa parole est semée, proposant avec son autorité calme et confiante, un autre chemin de vie, libéré des contraintes du religieusement correct, du politiquement correct, du socialement correct. Il met à distance le « correct » et la « vie », autorisant ainsi le règne des relations à la place des traditions, le règne du service auprès du plus petit dans ce monde.

Jésus annonce que le temps est arrivé, qu’il est temps de s’y mettre, et chacun a la capacité d’agir pour y répondre. C’est le moment pour toi d’entendre que Dieu est là, à la porte, et que ça ne tient qu’à toi de recevoir ce royaume chez toi ou d’y entrer, de changer ta façon de voir et de vivre, d’avoir confiance dans ce message nouveau. Jésus va chercher chacun jusque dans ses refuges toxiques, pour lui ouvrir une vie renouvellée. Il veut nous entraîner dans son sillage, car ce qu’il dit vient de ce qu’il vit, et son autorité est inséparable de l’unité intense de sa personne et de ses paroles.

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