26/12/2021 : de Pâque à Noël

Prédication du 17/06/2023 par le pasteur Marc LABARTHE

Luc 2, 40 à 52

 Dieu voulait un autre monde, un ciel nouveau, une terre nouvelle. Dieu aurait pu choisir un homme politique puissant, de sages prophètes de la haute société, de riches influenceurs. Mais Dieu a choisi volontairement ce qui est simple… pour changer le monde en profondeur.

Dieu avait choisi Marie. Dans un monde où les hommes ont le contrôle et même le pouvoir de vie et de mort sur les plus vulnérables, un monde où les femmes sont une commodité à échanger pour solder « une bonne affaire » entre deux familles, Dieu choisit une jeune femme pour mener à terme son projet d’avenir. Dans la simplicité et la confiance, malgré l’angoisse de l’incertitude que cette nouvelle vie ne peut que susciter, Marie a accueilli ce qui lui est imposé par l’ange. Luc nous dit qu’elle garde en elle ce qui se passe et tente d’y mettre du sens.

Or dans tout cela, son mari, Joseph n’a pas son mot à dire. Oui, c’est un descendant du roi David… mais fort lointain : il n’est ni un roi, ni un scribe, ni un pharisien. C’est un manuel, un simple charpentier… un gars soumis aux lois et aux décrets de la classe dirigeante. Ce n’est pas lui qui va changer le gouvernement en place… Le seul pouvoir qu’il a est de choisir de protéger ceux qui sont plus vulnérables que lui – Marie et son enfant avant tout. Ce qu’il a fait… sans savoir où tout cela pourrait le mener.

L’enfant de la crèche, si vulnérable et impuissant, grandira et déjouera les pronostics et les attentes-mêmes de ses parents, qui, les premiers, n’ont pas pris conscience de ce que signifiaient les paroles données par les divers messagers.

Rappelons les affirmations de Gabriel :  Tu vas avoir un bébé. Il sera grand et sera appelé Fils du Très-Haut, et le Seigneur Dieu lui donnera le trône de son ancêtre David. Il régnera sur la maison de Jacob pour toujours, et il n’y aura pas de fin à son royaume (1:32-33). Vous imaginez ce que ça peut provoquer comme cinéma dans la tête d’une ado à peine pubère ? Et dans celle de son fiancé Joseph à peine plus âgé ?

Que leur ont dit les bergers, dans les heures qui ont suivi la naissance? une parole d’ange, encore :  une bonne nouvelle d’une grande joie pour le peuple, car il vous est né un sauveur, qui est le Messie, le Seigneur.

Et puis encore le vieux Siméon : il est celui que Dieu a préparé devant tous les peuples, lumière pour la révélation aux nations et gloire de ton peuple, Israël. 

Il avait ajouté : il sera un signe qui provoquera la contradiction – et, toi Marie, une épée te transpercera – de sorte que soient révélés les raisonnements de beaucoup.(2.34s)

Tout cela trottait dans la tête de Marie, nous dit Luc : quels sont ses raisonnements ?  le trône de David – ouah! un royaume éternel – reouah! le Messie, le sauveur; gloire d’Israël – superouah! .
Peut-être qu’une des conséquences de toutes ces images a été le pélerinage annuel jusqu’à Jérusalem, la ville du grand roi, pour célébrer la Pâque, la libération de tout esclavage. Et voilà qu’à 12 ans, année de sa Bar-mizva, l’ado Jésus les accompagne dans ce voyage – serait-ce le début de la réalisation des paroles… ?  Mais le retour est perturbé, chaotique : Jésus a pris la tangente au moment du départ, échappant aux regards de ses parents, et sans prendre la peine de leur dire qu’il a mieux à faire à Jérusalem, et il les laisse prendre le chemin du retour sans lui. Jésus retourne au temple, pour écouter les enseignants et leur poser des questions, surprenant tout le monde par sa compréhension. Il faut déjà un sacré caractère pour faire cela.

Ses parents sont à juste titre effrayés, angoissés, de perdre leur espérance royale dans ce fils : que lui est-il arrivé? Une journée de marche dans un sens, puis une journée à rebrousser chemin, seuls, avec la fouille des buissons et fossés et les questions posées aux passants. Le surlendemain, leur angoisse explose dans l’indignation de découvrir le jeune Jésus agissant sans aucun égard envers eux : Pourquoi nous fais-tu ça ? ton père et moi on ne dort plus depuis 3 jours !

Et voilà que ce Jésus encore enfant, ne baisse pas la tête, ne se tait pas, mais réplique du tac au tac. Il répond à sa mère devant la foule impressionnée au temple : Dis donc, pourquoi diable êtes-vous inquiets ? Pour quelle raison me cherchez-vous ? Vous auriez dû savoir que j’étais ici (2:49) !

Jésus répond comme s’il était absurde que ses parents s’attendent à ce qu’il ait la décence minimale de leur faire savoir qu’il allait dormir au temple pendant trois jours…et peut-être même davantage s’ils n’étaient pas intervenu, dès le jour de leur départ. 

Jésus répond à la blessure, à l’inquiétude et à l’indignation de sa mère et de son père avec une parole sincère, mais qui les brûle et les transperce comme une épée…Il n’est ni tendre ni clément à leur égard. Pourtant, il retourne à Nazareth avec eux, et il leur reste obéissant – jusqu’au temps de sa rencontre avec Jean le baptiseur.

Ce premier clash a certainement provoqué une gravec coupure dans le film intérieur de Marie et Joseph, sans qu’ils puissent comprendre pour autant ce que cela pouvait signifier. Luc nous relate plusieurs autres conflits violents entre Jésus et sa mère, ses frères et soeurs. Au point que Marie n’est pas présente le jour de la crucifixion, selon Luc. 

Ce n’est que le jour d’une autre Pâque, le soir de la résurrection, que Jésus s’explique vraiment : il leur ouvrit l’intelligence pour comprendre les Ecritures. Et il leur dit : Ainsi il est écrit que le Christ souffrirait, qu’il se relèverait d’entre les morts le troisième jour et que la repentance pour le pardon des péchés, serait proclamé en son nom à toutes les nations, à commencer par Jérusalem. (24.45ss).

Même Marie, avec la richesse des citations des anges, n’aurait pas été en mesure de trouver cela. Personne d’autre que Jésus, ne semble avoir compris le fait que Messie, roi, Sauveur, trône de David, règne sur la maison de Jacob, signifiait en réalité être rejeté par la maison de Jacob, mourir cloué sur une poutre, et ensuite ressusciter d’entre les morts trois jours plus tard ! Tout l’inverse de l’imagerie populaire ou des contes d’accès à la royauté.

En fait, cette compréhension ne pouvait pas avoir lieu avant que Dieu n’achève la mise en forme de son projet, dans et par la mort de Jésus, et la victoire définitive sur les ténèbres, la mort et le mal, par la résurrection du Messie. Même si depuis longtemps, les prophètes d’Israël, la Loi et Moïse, les anges eux-mêmes, en avaient parlé. Personne ne l’a remarqué auparavant. Ce n’est qu’à partir de ce choc personnel et intérieur, individuellement ressenti même si c’est en groupe comme pour les disciples, que l’épée qui a transpercé l’âme au moment de la croix, se met à séparer ce qui vient du monde de ce qui vient de l’Esprit de vie. 

F&S, la nativité ne prend vraiment son sens, qu’une fois posée sur le fondement de la croix/résurrection. Que l’Esprit du Seigneur nous éclaire à nouveau et nous remplisse de la sagesse du Messie qui vient ! amen

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