18/06/2023 : Mission par amour

Prédication du 18/06/2023 par le pasteur Marc LABARTHE

Matthieu 9, 35 à 10, 16

 

Le texte de Matthieu présente Jésus parcourant en tout sens la Galilée, parce qu’il est temps de célébrer l’arrivée du royaume de Dieu. Malgré quelques guérisons, il ne se passe pas grand-chose, tant le travail semble immense. Il est donc temps de mobiliser des ouvriers, à savoir les douze disciples. Ils ne sont envoyés qu’à leurs semblables, et non à ceux qui ne connaissent pas leurs traditions juives. Ils ne doivent emporter avec eux que le strict nécessaire, et espèrent que les gens les nourriront en cours de route. Et préparez-vous à faire de grandes choses, leur dit Jésus : Guérissez les malades, guérissez les lépreux, ressuscitez les morts ! Et sachez que ça ne sera pas toujours facile. Lorsque vous êtes persécutés à un endroit, courez à l’autre, car le royaume arrive et les gens ont besoin de le savoir.

 

Ces exhortations de Mt, sont-elles transposables dans notre réalité du 21e, et applicables aux chrétiens et disciples de Jésus que nous sommes ? On pourrait peut-être en discuter des heures !

 

Déjà, nos conditions de vie et de déplacements ne sont plus les mêmes; les moyens de communications et la médecine ont vécu des révolutions incroyables. De nos jours, une bonne partie du monde a eu accès à la bonne nouvelle, que ce soit par des missionnaires ou par les réseaux sociaux. Il y a donc une grosse part d’incongruité à vouloir appliquer cet ordre de mission à notre réalité.

 

D’autant plus que dans notre occident surdéveloppé, qui a été nourri de l’enseignement chrétien, il y a une forte contestation de son utilité. Il y a une remise en question du message, parce qu’on s’interroge jusque dans les églises, pour savoir s’il y a encore une vérité qui mérite d’être servie au risque de mourir pour elle – qui soit autre que ces intégrismes fondés sur la violence. Ces questions vont de pair avec le constat que nos églises luthéro-réformées n’ont enregistré aucune croissance ces 10 ou 20 dernières années, bien au contraire.

 

Quant on entend le texte de Mt, on a l’impression d’une urgence à remplir dès que possible; avec des modalités de mise en oeuvre qui ne doivent pas se préoccuper d’intendance. Lorsqu’on se souvient des 3000 baptisés de Pentecôte (Ac2), le contraste est énorme avec notre réalité. Il y avait des convictions qui les faisaient partir à la rencontre des autres, au risque d’être moqués comme des ivrognes, et même battus et emprisonnés.

 

Alors comment pouvons-nous réagir, nous qui constatons le déclin des croyants dans nos rangs ? Nous entretons nos amitiés, mais notre zèle ne dépasse pas nos frontières de sécurité. Quels sont les enjeux qui font la différence entre ce qui se passait au temps de Jésus et de Pentecôte, et ce qui se passe chez nous au 21e?

 

Ce matin nous pouvons déjà recevoir 2 indications du texte de Mt. La première et la principale, qui pousse Jésus à mettre en place une nouvelle méthode de travail, que l’on trouve au v36 : En voyant les foules, il était bouleversé : une profonde pitié s’emparait de lui, car elles étaient comme des brebis abandonnées n’ayant pas de bergers, déprimées, harassées et abattues. Jésus est saisi aux entrailles par l’amour pour les gens, au point qu’il voit ces foules qui courent à leurs affaires et satisfaire leurs désirs, comme si c’était des brebis déprimées, déboussolées. Avons-nous le coeur serré à en souffrir pour les foules qui se rassemblent et se dispersent au gré des promoteurs de salut ? Voyez-vous, le groupe de prière n’a pas accueilli celles et ceux d’entre nous qui ont ressenti cette passion d’amour que Jésus a en lui-même pour ces gens aveuglés, afin de prier pour ce monde et pour la levée de moissonneurs. N’est-ce pas ce que demande Jésus ? v38: Demandez au Seigneur qu’il envoie des ouvriers.

 

Or, le royaume est là, qui attend que nous levions la tête et que nous laissions l’amour de Dieu en Christ trouver sa place dans nos coeurs et nos pensées. Si je n’ai pas l’amour, écrit Paul, je suis sans intérêt (1Co13). Ne déplaçons pas le problème ailleurs -au régional ou national- il est à notre porte.

 

La 2nde indication que je mets en exergue, c’est la réflexion que nous devons avoir sur la façon dont nous pourrions servir de prédicateurs et de témoins dans nos familles et près de nos amis. Nous savons biens que notre culture a énormément évolué, et que nous peinons à suivre le mouvement, au point que nos jeunes sont absents. Et comme nous n’offrons pas d’espace pour porter ces enjeux dans le regard bienveillant de Dieu, d’autres solutions surgissent, bien plus radicales et intransigeantes. Et nous sommes encore plus déroutés.

 

Mt nous présente un portrait particulier des disciples qui doivent proclamer le même message que nous, à savoir que Dieu aime ce monde, et que nous sommes appelés à faire vivre son Règne sur terre en nous aimant les uns les autres. Et comment cela ? Jésus donne un cadre : ne pas se disperser tous azimuts, et annoncer l’évangile libérateur; puis il recommande de laisser de côté les besoins essentiels pour vivre, en expliquant enfin comment faire. Nous pouvons comprendre ce cadre comme étant celui de savoir organiser nos priorités et accepter des renoncements temporaires. Puis de ne pas nous encombrer de tout ce qui provoquer un conflit – l’argent, l’habit, la nourriture, l’outil de travail. Enfin, il s’agit de sortir du confort de chez soi pour aller sur le terrain de l’autre, en espérant qu’un partage aura lieu.

 

Cela peut paraître logique, voir normal. Alors qu’est-ce qui cloche ? qu’est-ce qui manque, où est le problème – pour que notre communauté soit moribonde et pour l’instant sans grand avenir ? Nous l’avons vu, le bât blesse avec le premier point, à savoir la compassion pour les foules éperdues; et les autres points blessent à divers niveaux, et surtout le dernier, qui est de sortir de notre confort, de nos habitudes, pour établir de nouveaux rapports. Alors, nous pouvons nous contenter de ce que nous avons et laisser venir la mort tranquillement, ou entendre l’Esprit du Seigneur appeler chacun à devenir à nouveau témoin du Royaume. Prions cela durant cet été, car dès la rentrée, nous aurons des priorités à définir et des actions à conduire.

 

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