17/10/2021 : Prendre le pouvoir

Prédication du 17/06/2023 par le pasteur Marc LABARTHE

Marc 10, 33 à 45

Ce chap 10 de l’Ev de Mc raconte des petites histoires dans lesquelles Jésus définit comment prendre le pouvoir à sa façon. Cela commence avec la répudiation de l’épouse, puis la présence bruyante des enfants, puis la place de ce qui nous enrichit, et les 3 épisodes que nous avons lus, auxquels s’ajoute encore l’aveugle rabroué, le fils de Timée. 

Jésus est donc en marche avec les disciples, mais il fait venir près de lui les 12 pour une analyse de ce qui va se passer. Nous montons à Jérusalem, mais ce ne sera pas pour faire du tourisme ni un pélerinage. Car Jésus annonce, encore une fois, qu’il sera livré aux mains des religieux, puis aux occupants romains, qu’il subira des tortures et la mort ; et que 3 jours après, il se relèvera.

A ce moment-là, dit Mc, Jq et Jn se faufilent devant, comme s’ils n’attendaient que cet instant-là, la victoire de Jésus et donc son règne universel. C’est l’occasion idéale de se placer au plus près de lui, malgré les difficultés du chemin que Jésus leur rappelle.

Et enfin, nous avons la réaction on ne peut plus normale, des autres apôtres qui s’en prennent rudement à Jq et Jn. Jésus doit intervenir, et il les enseigne au sujet de la gestion du pouvoir entre eux, dans leur communauté, dans l’église.

Quand on regarde bien, ces 3 histoires, celle de la mise à mort de Jésus que les apôtres comprennent bizarrement ; celle qui remet en place les disciples qui pensent mériter de seconder Jésus dans son règne ; et enfin celle où Jésus, le maître, se met au service de tous, nous avons fois la question du pouvoir qui entre jeu : le pouvoir et l’exercice du pouvoir. A chaque fois, Jésus fait face à cette question de manière complètement différente de ceux qui l’exercent, que ce soient les disciples, les autorités religieuses ou les forces politiques. 

Et si cette question à des échos dans nos actualités locales et bien au-delà, ce n’est pas fortuit ; car Jésus n’a pas caché son activité aux yeux des humains, même s’il n’a pas été un provocateur volontaire. Ses discours et ses actes de guérison n’ont jamais le projet de prendre le pouvoir, mais plutôt de redistribuer le pouvoir, de donner à chacun une place dans la société. Car le pouvoir tel que Jésus l’exerce et l’explique tout au long de ce chap.10, ne correspond pas au pouvoir comme nous l’avons mis en pratique bien souvent, dans la société, le couple, la famille, et les domaines religieux, de l’économie ou du politique.

Le pouvoir de Jésus, lorsqu’il monte à Jérusalem, n’est pas de prendre la fuite avant qu’il ne soit trop tard ; et il ne prépare pas une insurrection par les armes pour combattre les policiers et soldats venus l’arrêter ; à vues humaines, il n’a plus aucun pouvoir : il n’a pas droit à des avocats pour se défendre; il ne répond pas aux fausses accusations, et il ne peut échapper aux tortures infligées. Jusque sur la croix, jusqu’à son dernier souffle, il n’a aucun pouvoir. Un texte nous dit qu’il aurait pu appeler Dieu et ses armées d’anges à son aide – mais il ne l’a pas fait : qu’est-ce à dire ? Et même lorsqu’il se lèvera de la mort, c’est l’oeuvre de Dieu. Son pouvoir ne se verra qu’après avoir trouvé le tombeau vide; son pouvoir sera de se rendre visible et de disparaitre, d’agir ici ou là, partout sur la terre au plus près des humains, un pouvoir qui ne s’impose pas avec panache ni rigueur.

Jq et Jn croient que cette victoire sur la mort leur permet de se placer, de mettre en avant leur bonne entente avec Jésus, pour s’asseoir dans la gloire à ses côtés. C’est la caricature de toutes ces courses vers le pouvoir à travers le monde politique et religieux. Jésus ne conteste pas le fait qu’il va régner un jour. Mais l’accès à ces places enviables ne passe pas par les avantages acquis ou les faveurs du maître, ni par les mérites, la séduction, ou le succès qui efface les autres. Jésus déclare que ce qui peut ouvrir le chemin en direction de ces places-là, c’est de boire la coupe qu’il a bue et de passer par des souffrances semblables aux siennes. Car c’est là sa gloire, ne l’oublions pas. 

Assez subtilement, les religions ont alors donné à ceux qui sont morts au nom de leur dieu, le titre de martyrs, et elles osent dire qu’ils sont donc à des places toutes spéciales dans la gloire de Dieu. Mais Jésus ne confirme pas cette idéologie, il se refuse à lier le martyr avec les bonnes places – un coup de pieds dans la fourmillière des saints et martyrs !. Car seul Dieu accorde le pouvoir, et aucune pression ne peut s’exercer sur lui. Qui connaît ce que Dieu sait pense voit?

Enfin, devant la colère des autres apôtres, qui se croient floués et ne comprennent pas encore ce que Jésus vient d’affirmer à Jq et Jn, Jésus répète aux 12 encore une fois ce qu’il a déjà enseigné, au sujet de l’exercice du pouvoir dans l’Eglise. Vouloir reprendre et appliquer les règles des systèmes politiques, même en les améliorant, ne correspond pas à ce que Dieu demande. Depuis les dictateurs jusqu’à certains élus locaux, trop d’entre eux cherchent le pouvoir, ils oppriment leurs peuples tout en se faisant appeler bienfaiteurs — et ça n’arrive pas chez nous bien sûr. Jésus est ironique à l’égard des apôtres qui se chamaillent, mais en contrepartie, il leur demande une attitude bien différente, à eux et donc aux églises qui surgiront: si l’un de vous veut être le premier, il doit être l’esclave de tous. Etre le premier, ce n’est pas dominer, mais être à genoux ; ce n’est pas être audessus des autres dans la gloire, mais au service de tous à ramasser les poubelles. Le seul « pouvoir » qui est reconnu, est celui du service auprès du plus faible, du rejeté.

Jésus nous indique donc un chemin, une manière de prendre et d’exercer le pouvoir. Tout pouvoir qui conduit des humains et même la création, à la mort, n’est pas le sien et ne peut se recommander de lui. Tout pouvoir qui se prend par copinage, par le mérite, et même par le martyr que les hommes admirent, ce n’est pas le sien. Il n’y a qu’un chemin dans le monde qui signifie ce qu’est le pouvoir selon Dieu, c’est le chemin qui reste toujours dans le service. Attention! ce n’est pas en s’écrasant soi-même ! Etre soi-même dans le choix du service. Certains ont réussi à rester proche de cette attitude toute leur vie, sans céder à la séduction suscitée par l’admiration des foules. C’est une lutte de tous les jours, mais la parole libératrice de Jésus peut alors agir avec puissance, guérir les malades, illuminer les ténèbres, relever les petits dans notre monde. amen

 

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