^{Jean 21, 1 à 16}

à partir du retournement de Marie, DBourguet, citation p.112

A l’appel de son nom, nous dit Jean, Marie se retourna (v16 – TOB,LS;≠PV), comme si son nom avait été prononcé dans son dos, alors qu’il n’en est rien, bien sûr, puisque Marie s’était déjà retournée pour être face à face avec lui  ! N’est-ce pas curieux ?

Lisons le texte avec attention : Marie s’est trouvée devant les anges, et s’est déjà retournée une première fois pour parler avec Jésus :  en disant cela (aux anges), elle se retourna et vit Jésus debout…  (v14). Quel étrange récit : Marie interrompt son dialogue avec les anges et se retourne pour faire face à Jésus, puis elle se retourne à nouveau, quand ce dernier l’appelle par son nom, toujours pour faire face à lui ! Que veut donc dire Jean à travers ce double retournement? De quoi s’agit-il vraiment? 

Le double retournement de Marie, pour être toujours face à Jésus, n’est certainement pas un retournement physique, un mouvement du corps, mais plutôt un retournement intérieur, d’ordre spirituel. La rencontre avec le Ressuscité se vit au plus profond du cœur. 

Lorsque le Ressuscité nous parle, sa parole provoque en nous des retournements multiples et successifs. La voix du Ressuscité surgit de telle manière qu’il nous faut toujours nous retourner pour lui répondre. Sa parole nous prend à contre-pied et nous bouleverse intérieurement. 

Ces bouleversements intérieurs seraient-ils de l’ordre de la conversion? Sans doute que oui ! C’est en effet avec ce verbe « se retourner» que Jean rend la notion de conversion. Le bouleversement provoqué par la rencontre avec le Ressuscité est une profonde conversion. 

Déjà le premier retournement de Marie devant les anges ne peut être compris comme un simple mouvement physique. En effet, lorsqu’on est en présence d’un ange, il est tout à fait inadmissible, inconcevable même, de se retourner. On se prosterne (Nb 22.31), si l’on n’est pas figé par la peur, mais on ne tourne jamais le dos à un ange, surtout pour regarder un jardinier … !

Qui peut bien être ce jardinier pour avoir un tel impact sur Marie, alors qu’il n’a pas encore ouvert la bouche, ni fait le moindre bruit pour manifester sa présence ? La force de la présence silencieuse du Ressuscité est telle que Marie interrompt son dialogue avec les anges et leur tourne le dos ! 

Il en est bien ainsi du Ressuscité dans nos vies : la perception de sa présence silencieuse suffit à nous retourner intérieurement. Sa présence est perceptible ; elle se sent, mais sans qu’il soit possible de dire comment. Marie se retourne donc, sans même pouvoir reconnaître celui qui la bouleverse plus encore que des anges l 

Les retournements intérieurs de Marie ne sont pas seulement sa propre œuvre ; ils sont surtout l’œuvre du Christ qui, par son silence comme par sa parole, peut retourner une vie. Il y a synergie divino-humaine dans ce bouleversement intérieur profond, cette conversion. 

Ajoutons encore que la cohésion de cette synergie est assurée par l’Esprit Saint. Qui d’autre que lui, en effet, est en mesure de nous faire percevoir la présence silencieuse du Ressuscité dans nos vies, alors qu’il n’a rien fait encore pour se faire reconnaître?
Qui d’autre que l’Esprit Saint sait orienter notre vie vers Celui qui se manifeste à nous de manière si mystérieuse? 

De lui-même, sans l’aide du Saint Esprit, l’homme est absolument incapable de discerner la présence silencieuse du Ressuscité. Lorsque le Christ nous attire à lui par son silence ou par sa parole, c’est aussi l’Esprit qui nous pousse vers lui. Notre retournement intérieur, notre conversion est aussi l’œuvre de l’Esprit, en synergie avec la puissance de la parole et du silence du Christ. 

Marie n’a pas l’air étonnée de rencontrer des anges au petit matin. Elle se retourne pour contempler le vivant puis se retourne encore, comme dans une danse intérieure, sans cesser de contempler le Bien Aimé. 

Que cette grâce nous soit accordée !

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