16/06/2024 : de la tente à la maison

Prédication du 16/06/2024 par le pasteur Marc LABARTHE

2 Corinthiens 5, 1-2 + 6-10

Un texte difficile au premier abord, que nous n’avons pas lu depuis longtemps. Nous l’avons entendu dans une traduction française adaptée, aussi, je vous rappelle 2 versets dans la version L.Segond:

Nous savons, en effet, que, si cette tente où nous habitons sur la terre est détruite, nous avons dans le ciel un édifice qui est l’ouvrage de Dieu.
il nous faut
tous comparaître devant le tribunal de Christ, afin que chacun reçoive selon le bien ou le mal qu’il aura fait, étant dans son corps.

C’est la phrase que nous avons en tête, bien souvent, de ce passage écrit par l’apôtre Paul. Parce que c’est la dernière sur laquelle on arrête la lecture. Et ce v. a beaucoup servi pour annoncer le jugement de Dieu, le terrible jugement qui va séparer les bons des mauvais. Et le prédicateur s’attarde sur les horreurs qui attendent les méchants, espérant qu’ils changent d’avis. L’angoisse était suscitée pour manipuler les gens, et les encourager à suivre les exigences religieuses, conversion, adhésion, soumission, même si ce n’était qu’une façade.

Mais en agissant ainsi, les prédicateurs brandissent une interprétation du tribunal de Christ à partir de notions qui viennent des tribunaux humains ; le prédicateur se prenant pour le procureur, et justifiant le pardon du Christ qui daigne bien regarder le pécheur, lui évitant les peines éternelles. Les images s’appuient sur les condamnations prononcées par les tribunaux, avec exclusion de la vie sociale — que ce soit la prison, l’exil ou la mort, et spirituellement, l’enfer…

Or, le tribunal dont parle l’apôtre Paul n’entre pas dans cette interprétation qui satisfait le pouvoir de quelques prêtres sur l’assemblée. Nous devons mieux comprendre l’objectif de Paul. Sa démarche n’est pas le jugement dernier ni la condamnation, mais une tout autre considération.

Le chap 5 aborde la question de la mort qui va nous détruire. Et pour cela il utilise une parabole, avec l’image de la tente. Il compare l’existence humaine, physique ou corporelle, à la vie sous tente. Ceux qui ont fait du camping savent que la tente protège un peu des intempéries, mais le froid, la pluie, transpercent la toile, le feu la brûle, le vent l’applatit voire l’emporte, et l’inadvertance ou la malveillance peuvent la détruire. Et même si tout se passe bien, l’on est content de retrouver des murs solides, une porte qui ferme, un endroit chaleureux…  

Cette fragilité de la tente est à l’image de notre corps – on est sensible au froid, à la pluie, au feu, et de même nous cherchons la protection contre les calamités, les maladies, les violences, et nous espérons trouver un lieu où nous serons en sécurité. Or, nous dit Paul, cette maison solide et accueillante nous est promise, préparée par Dieu lui-même, donc une maison vraiment stable, durable, un véritable cocon de sécurité et d’amour. Nous n’y sommes pas encore, nous devons encore vivre quelque temps dans notre tente fragile, mais nous regardons avec espérance vers cette maison céleste -v2. 

Paul va même plus loin en disant que notre véritable demeure, ce n’est pas la tente, mais la maison en Dieu. Sur terre, nous ne sommes que de passage, c’est comme un exil — à l’image de tous ces réfugiés sous des tentes de fortune, nous faisons du camping, mais ce n’est que pour un temps limité, et notre objectif est de rentrer à la maison, ce qui sera comme revêtir une nouvelle identité, la maison que Dieu nous a préparée. Nous soupirons alors que nous sommes dans cette tent et nous attendons avec un ardent désir d’entrer dans cette habitation (v2).

Autrement dit, nous supportons tant bien que mal notre vie humaine avec ses aléas de toutes sortes, mais nos regards, notre attention, toute notre énergie est tendue vers la maison qui est prête à nous accueillir. En fait, tout ce passage est comme aimanté par cette perspective, au point que la fin du v.8 a encouragé les condamnés à mort pour leur foi, ceux qui aujourd’hui encore sont assassinés par les intégrismes sanguinaires : Si nous avions à choisir, nous péférerions même quitter ce corps pour aller rejoindre notre vraie patrie auprès du Seigneur.

Nous sommes pourtant encore dans notre corps fragile. Et quoiqu’il arrive, nous restons plein de courage (v6). Car notre chemin pour rejoindre la maison de Dieu ne se fait pas au hasard ni au petit bonheur la chance. Puisque nous avons appris ce que Dieu nous a préparé, nous marchons dans cette direction avec confiance, avec foi (v7).  Nous cherchons Dieu, nous cherchons les points de repères qu’il a laissés sur notre chemin, et nous obéissons à ce qu’ils indiquent. Notre seule ambition est de plaire au Seigneur, écrit Paul (v9). Nous appliquons non pas nos désirs, mais la volonté du Christ, son commandement d’aimer Dieu et d’aimer le prochain.

Et puis le jour de notre arrivée devant cette maison tant espérée, il y a comme un nettoyage, une mise au propre de notre vie pour que nous puissions revêtir cet habit tant attendu, que nous correspondions pleinement à ce que Dieu nous a préparés. Ce n’est pas un tribunal qui condamne à l’enfer, mais qui ôte ce qui ne correspond pas au vêtement préparé. Pour l’apôtre,  chacun recevra la récompense d’après sa conduite durant cette vie terrestre et les actions, bonnes ou mauvaises, qu’il aura accomplies dans son corps (v10). JC ôte les scories que nous avons gardées ou prises ou pas vues, et ce sera notre récompense, notre prix, que d’être ainsi revêtus par le Christ lui-même de notre maison.

Ce texte et ce tribunal ne conduisent pas vers l’angoisse, ni la condamnation à l’enfer. La pensée de Paul est de nous dire que le Christ accomplit totalement à ce moment-là, pour nous, ce qu’il a fait à la croix. C’est la finalisation de son oeuvre de salut pour l’humanité.

La mort et la résurrection du Christ ont changé les perspectives : la mort c’est quitter cette terre ; ce n’est pas la fin de tout, mais l’entrée dans la vraie vie. La mort c’est recevoir notre habit d’éternité, c’est la rencontre du Christ qui ôte le péché du monde et nous revêt de la vie éternelle. Et cela a du sens jusque dans les activités auxquelles nous devons renoncer. Portez cela dans la prière ! amen

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