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Prédication du 17/06/2023 par le pasteur Marc LABARTHE
Magnifique histoire, que celle de Cana, où Jésus change de l’eau en vin, sans y toucher. Magnifique histoire, aussi, par la manière dont Marie est mise au premier plan au début de la noce, pour parler du vin qui manque, même si elle prend une claque de la part de son fils.
Et justement, étrange histoire, parce que Marie disparaît de l’Ev. et ne réapparaitra qu’à la croix afin d’être accueillie par un disciple. Etrange histoire aussi, avec ce 3e jour ; 3e jour de quoi ? Ce 3e jour, il y a une noce à Cana, au nord de Nazareth, comme entre Livron et les Petits Robins.
Si l’on remonte au ch.1, on repère très vite qu’il y a 4 jours qui se suivent, dans un dialogue qui commence avec Jean le baptiseur, et qui se termine avec Jésus et Nathanaël, le 5e disciple.
Avec le 3e jour, on entre dans le 7e jour, la fin du cycle d’une semaine. Référence bien sûr au début de l’Ev qui évoque la création, et ici le 7e jour où Dieu se repose. A Cana, Jésus est là avec 5 disciples, parce que sa mère y est invitée plus spécialement, et le 7e deviendrait alors l’accomplissement, le jour de fête et d’abondance, celle de la vie féconde du couple qui se marie, celle de la joie pour les invités. Mais le vin manque soudain. Qu’est-ce à dire ? en pleine fête du 3e jour ? Est-ce comme le rappel de la blessure originelle (Gn 3)?
Et dans notre passage, en quoi ce manque de vin concerne tant Marie, et pourquoi imagine-t-elle que Jésus doit être informé ? La fin du vin est un signe pour que les invités rentrent chez eux, et laissent le couple vivre sa vie.
Alors pourquoi Marie veut-elle que la fête continue ? Jésus lui rétorque sèchement que son heure n’est pas venue. Elle se détourne et attire l’attention d’autres
Mais Jésus cède quand même à la demande indirecte en fournissant gratuitement quelques milliers de litres de vin parmi le meilleur de l’époque. Ce qui surprend aujourd’hui, c’est qu’il le fait dans la discrétion (≠réseaux) : ses « efforts » restent inconnus, sauf des serviteurs, de Marie et des disciples. Que la fête continue ! mais elle finira quand même, parce que ce n’est pas l’heure encore pour la fête sans fin !
L’auteur de l’Ev. met donc Marie en avant à cette noce de Cana, tout en démontrant qu’elle se plante sur l’horaire de Jésus. Même Marie n’est pas dans le secret de Dieu ! Tout ce qui a été dit à son sujet, sa volonté de faire écouter Jésus dans ses demandes, pas de problème. Mais toute mère de Jésus qu’elle fut, elle ne sait pas le ministère de Jésus, elle n’a pas compris l’heure de son fils. Et Jésus d’agir de façon à rester libre pour son heure, en ce 3e jour. Son geste concerne le plan local, pour les mariés, et ouvre aussi un avant-goût du vin nouveau de l’ultime festin des noces de l’Agneau, après le 3 jour, au temps préparé par Dieu.
Parce que le véritable 3e jour, c’est celui de son heure, que personne n’a vu arriver, et que Jean décrit à la fin de l’Ev (13.1; 17.1) : Quand l’heure de Jésus est arrivée, qui donc a repéré que Dieu oeuvrait à ce moment-là ? personne ne voyait autre chose que Jésus partageant la Pâque, les prières, et une promenade nocturne qui s’est terminée au poste de police. Ni Pilate, ni les autorités religieuses, ni la foule n’ont reconnu en cet homme la présence de Dieu, lorsqu’ils ont prononcé leur verdict : Crucifie-le ! Ils ont tous démontré leur véritable allégeance en se soumettant au prince du monde : Nous n’avons d’autre roi que l’empereur. (19.15)
En ouverture à son livre, Jean avait annoncé cet aveuglement (1:11) : Il est venu chez les siens, et ils ne l’ont pas accepté. Pourtant, l’heure véritable de Jésus est arrivée un jour, celle où il a bu du vin mauvais : Il y avait là un récipient plein de vin aigre. On fixa à une tige d’hysope une éponge imbibée de vin aigre et on l’approcha de sa bouche. Quand il eut pris le vin aigre, Jésus dit : Tout est achevé. (19.29) — vous avez compris, on est avec lui, sur la croix —
Boire du vin aigre afin que nous puissions boire à la coupe du salut, celle du festin sans fin. Voilà l’heure du Seigneur. Puis Jésus baissa la tête et rendit l’esprit.(19.30) Expirer doucement son dernier souffle, comme un travail de mise au monde de la miséricorde de Dieu. Pendant que nous continuons à nous enivrer du monde, lui disparait dans la mort et la tombe.
Jean fait réapparaître Marie, à la croix, jour de la mort de Jésus. A-t-elle compris que c’était son heure à lui, à ce moment-là ? Elle ne dit rien, ne peut rien dire. Toujours est-il que le 3e jour, après sa mort, le 1er jour de la semaine (20.1), c’est une autre Marie, Magdala, qui est face au tombeau ouvert, et qui fera la première rencontre du Jésus à la chair meurtrie, mais vivant. C’est de cette manière que tout est achevé, que l’heure est passée, que le vin nouveau se prépare : non pas Cana, mais Golgotha et la tombe vide au jardin.
Jésus ne restera pas longtemps près des siens après la croix ; 40 jours selon Luc. A cela s’ajoutent des milliers de manifestations à travers l’espace et le temps, dans cette même chair de résurrection meurtrie, à des femmes, des hommes, des jeunes et des vieux, afin de recevoir l’invitation au festin du jour sans fin, où un vin encore meilleur que celui de Cana sera servi (Es.25.6).
La promesse de ce festin sans fin s’immisce déjà dans notre présent : chaque fois que nous buvons la coupe, nous nous souvenons de la mort de JChrist. Nous nous souvenons que Jésus oeuvrait discrètement à Cana alors que son heure n’était pas encore venue et, qu’il oeuvrait plus obscurément encore au Calvaire, quand son heure est venue. Lors du partage autour de Sa parole et de Son repas, dans le service au monde qui le rejette encore, Jésus est présent pour étancher notre soif de la fête, et du vin qui déjà fait du bien : plénitude de son amour qui remplit tout, parce que cet amour s’est donné entièrement, jusque dans les ténèbres de la mort.
La noce de Cana est magnifique et étrange. Elle nous ouvre à la promesse du festin dans l’amour plein du Seigneur, et nous met en garde contre les accaparements possibles même des plus proches. Le discernement se fait grâce à l’heure de Jésus: La croix demeure dans la chair du Fils, le 3e + 8e, témoignant de son amour pour toute l’humanité. Ayons cette heure-là en point de mire cette année!
Amen