14 avril 2024 : confiance du témoin

Prédication du 21/01/2024 par le pasteur Marc LABARTHE

Luc 24, 35 – 48     1 Jean 2,1-5

Nous avons entendu l’Ev selon Marc, avec les femmes qui ont besoin de temps pour finir de traverser la détresse de la mort, et arriver un jour à rencontrerJésus, celui qui a été réveillé et qui est devant, en Galilée – i.e. dans leur vie quotidienne.

Puis l’Ev selon Jean, où Thomas est le tout premier à avoir franchi le pas de la confiance en Jésus, le crucifié vivant, son Seigneur et son Dieu, alors que ses compagnons disciples restaient barricadés dans leurs peurs, malgré leur joie.

Aujourd’hui, l’Ev selon Luc essaie à son tour de nous faire comprendre que Jésus crucifié est bien vivant. Son parcours commence aussi le dimanche matin devant le tombeau ouvert et vide, lorsque des femmes étonnées, entendent 2 messagers rappeler les paroles de Jésus ; et cela leur suffit pour comprendre qu’aujourd’hui, troisième jour depuis sa mort, Jésus a été réveillé des morts, et elles le racontent aux disciples. 

Puis on a la lente progression des 2 disciples sur le chemin, qui reconnaissent Jésus à la fraction du pain. Ils font demi-tour et arrivent tard dans la nuit auprès des autres, qui sont excités mais dans l’expectative : Jésus est vraiment réveillé, mais ça veut dire quoi, concrètement ? Ils parlent de tout ça, lorsque Jésus se matérialise au milieu d’eux, et leur dit : “chalom alerhem” la paix, la douceur, la plénitude de Dieu soit en vous, vous saisisse et vous change.

Et devant leur stupeur et leur crainte d’être manipulés par un hologramme – autrefois on disait fantôme, il leur montre les marques sur son corps – comme pour Thomas. C’est bien l’ensemble des disciples qui ont besoin de voir pour être rassurés, de toucher pour se convaincre : Regardez mes mains et mes pieds : c’est bien moi ! Touchez-moi v39. Et pour briser tout confusion, il mange même un peu de poisson grillé : non non, ça ne retombe pas par terre ! 

Jésus a donc pris le temps de la journée complète de ce dimanche-là, pour aider les disciples, femmes et hommes, à cheminer. A chaque fois, c’est à partir de la mort qu’il essaie de les faire cheminer vers la vie plus forte que la mort : avec les femmes au tombeau, les paroles font mémoire de ce qu’il a dit à propos de sa mort et de son réveil (v7). Avec le couple sur le chemin, après une longue étude biblique, c’est la fraction du pain, la déchirure de la mort, qui les réveille; et au milieu d’eux, ce sont les cicatrices des coups mortels qu’il leur fait toucher, pour les convaincre que c’est bien lui, Jésus, le crucifié réveillé. 

Thomas en a fait une déclaration personnelle, que Jésus espère semblable chez tous ceux qui entendront cette histoire : heureuses les personnes qui font confiance sans avoir vu. Chez Luc, Jésus leur demande aussi quelque chose : vous êtes mes témoins -v48. Le témoin, avant d’être un martyr qui meurt, est une personne qui adhère de toute sa personne, corps-âme-esprit, à cette histoire dérangeante du Jésus qui meurt pour que la vie prônée par Dieu soit la plus forte. 

Car c’est bien l’événement de la résurrection qui va changer du tout au tout, la manière de parler, de vivre, de ces disciples ; et si c’est la résurrection, c’est qu’il y a la mort juste avant. Ils sont témoins que celui qui est mort, et qui porte les stigmates de sa mort, c’est lui qui les rencontre et leur apporte le shalom de Dieu, la paix et la vie qui peuvent changer toute existence humaine. 

La notion de martyr a pris le dessus, parce que le témoin fait confiance totale au Dieu qui a réveillé Jésus, même si la mort survient contre lui. Le témoin sonde les Ecritures comme avec le couple de disciples d’Emmaüs, et il se nourrit des paroles et des gestes de Jésus. Le témoin a pris parti pour Dieu qui se fait proche des petits, dont l’attente première est le service bien plus que le pouvoir, la marche bien plus que l’installation dans le temple, l’équité dans le partage des biens et non la croissance constante. Le disciple est témoin de tout cela jusqu’aux gestes de guérisons contre le démon, gestes de compassion et de liberté qui ont conduit Jésus à se faire haïr des religieux et politiques au pouvoir, jusqu’à sa mise à mort.

Vous êtes mes témoins : le parcours de Jésus est celui que Dieu attend de nous, parce qu’il passe par le renoncement à des pratiques et des discours trompeurs, et la mise en oeuvre d’autres formes de vie. Nous savons parfois renoncer à des attitudes trop contraires à ce que l’Evangile propose. Le témoin accepte de vivre avec des marques de renoncements dans sa vie, qui peuvent être des morts – mort dans l’âme et parfois beaucoup plus !  Il a cette confiance qu’il ne fait que traverser la mort afin de vivre au-delà de cette mort dans la paix du Christ, même s’il lui reste quelques blessures plus ou moins visibles et sensibles, provoquées par ces changements.

C’est en nous montrant bien vivants avec nos marques de mort, que nous pouvons témoigner de la force de vie qui nous a fait traverser la mort. Le vrai courage est d’accepter cette fragilité qui laisse souvent des cicatrices dans l’existence. Nous sommes ainsi témoins de JC, mort et ressuscité. Et le témoignage de notre vulnérabilité peut laisser grandir en nous, et en ceux qui n’ont pas Dieu, la puissance de vie que nous recevons du Christ. 

Ce cheminement peut rester très humaniste – accepter des renoncements pour une vie plus simple ou meilleure ; et il peut prendre des dimensions spirituelles fortes lorsque nous choisissons, avec l’aide de Dieu, de mourir à nos illusions et égarements tout au long de l’existence, renoncer à ce qui nous isole ou nous place en dominateurs et sauveurs. C’est un chemin de confiance, car le témoin fait confiance à Celui qu’il a vu et ce qu’il a reçu. Et la confiance en Dieu permet de découvrir jour après jour la force de son amour au creux de nos douleurs ou de nos manques. Nous sommes témoins de Jésus, lui qui a fait confiance en Dieu pour accepter sa volonté même si elle devait passer par la mort violente. Dieu a répondu a sa confiance en le réveillant hors des morts ; il en garde les stigmates, afin de nous accompagner dans nos épreuves, en nous faisant confiance pour que nous, nous soyons témoins de sa vie. 

 

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