16/10/2022 : courage et foi

Prédication du 17/06/2023 par le pasteur Marc LABARTHE

Exode 17, 8 à 13       Luc 18, 1 à 8

F&S, regardez autour de vous – certains bancs sont inoccupés… de 2 choses l’une : ou vous avez vu trop grand – préparé trop de bancs par rapport aux personnes que vous avez sollicitées, ou bien les invités ne sont pas venus … Ils ont abandonné. Qu’en pensez-vous ? 

Lorsque Jésus a scandalisé certains de ses disciples, par son enseignement qui contredisait leurs habitudes, et surtout leur conception de ce que devrait être le vrai Sauveur, beaucoup de ses disciples se sont retournés et ne l’ont plus suivi. Jésus a alors demandé à ses douze disciples les plus proches : Voulez-vous aussi partir ? (Jn8). Voilà une des causes de l’abandon…

Dans l’Ev. du jour, Luc met en dernière parole de Jésus la question : trouvera-t-il des croyants sur la terre ? Disparus ! où sont-ils ? La parabole conduit donc Jésus à établir un lien entre la prière et la foi, la non-persévérance et l’abandon.

Les gens abandonnent la foi pour de nombreuses raisons, hier comme aujourd’hui : l’hypocrisie – vous savez bien, ceux qui se disent engagés et qu’on ne voit jamais; ou la mesquinerie pointilleuse, ou des excuses d’une platitude désespérante ; l’abandon vient aussi de prières sans réponse, de déceptions amères dues à tel pasteur ou tel conseiller, et des doutes intellectuels et spirituels; ou tout simplement l’ennui – manque d’intérêt, l’absence d’objectif partagé.

Luc nous parle de cette question de l’abandon à partir de la résistance. Jésus raconte une parabole sur une veuve qui demande justice contre son oppresseur. Jour après jour, elle fait appel à un juge, qui ne craint pas Dieu et n’a pas de respect pour les gens. Jour après jour, ce juge corrompu refuse de l’aider. Mais elle persiste, importunant inlassablement le juge, jusqu’à ce qu’il en ait assez de sa présence : Je lui rendrai justice, se dit-il, pour qu’elle ne m’épuise pas (grec, pour qu’elle ne me fasse pas un œil au beurre noir).

Luc nous dit que Jésus introduit la parabole avec la nécessité de toujours prier et de ne pas se décourager. Mais c’est troublant. Sommes-nous vraiment censés harceler Dieu jusqu’à ce que nous l’épuisions ? Est-ce cela la prière : déranger un Dieu au cœur dur jusqu’à ce qu’il cède ? Quand je reçois une réponse à ma prière, est-ce seulement parce que Dieu en a marre d’entendre ma voix et veut que je me taise ?

Heureusement, Jésus explique que la parabole fonctionne par contraste : nous ne devrions pas penser que Dieu est le juge injuste, car contrairement au juge corrompu, Dieu accordera rapidement justice à ceux qui crient vers lui. Oui, bon, mais cette explication soulève alors d’autres questions, car nos expériences vécues la contredisent. Trop souvent, Dieu tarde et nos prières les plus ferventes – pour la guérison, la justice, la protection, la paix – restent sans réponse. Trop souvent, nos prières -que nous croyons ferventes- nous amènent à expérimenter Dieu comme le juge indifférent, éloigné de nos demandes pour des raisons qu’on ne peut que trouver injustes et anormales. 

Alors que penser de cette parabole ? Eh bien, pour commencer, nous devons nous rappeler que l’histoire parle, non pas de Dieu, mais vraiment de nous. Elle met en lumière l’état de nos cœurs et les motivations derrière nos prières. Oui, ce qui est en jeu n’est pas qui est Dieu et comment Dieu opère dans le monde, mais qui nous sommes et pourquoi nous manquons de courage et de persévérance dans la prière, et donc aussi dans la vie ecclésiale et spirituelle.

La parabole commence par une exhortation à ne pas se décourager, adressée aux disciples (nous!). Qu’est-ce que ça veut dire? Qu’est-ce que perdre courage dans nos vies habituelles ? C’est bien souvent la lassitude, la résignation, l’engourdissement et le désespoir. Quand je perds courage, je perds la capacité de me concentrer et mon sens de la direction. Mon GPS spirituel se détraque, et tous les chemins ne mènent nulle part. Comme un brouillard efface tout repère, je commence à douter des intentions de Dieu. Je deviens irritable et cynique, ne regardant plus que mes pieds et mon nombril. Mais il y a aussi d’autres voies sans issue possibles, que les uns ou les autres connaissent.

Et pourtant, dans la parabole de Jésus, la veuve, agaçant le juge, est l’image même de la détermination, de la précision, de la vivacité et de la clarté. Jésus prend à dessein une veuve : dans la société de l’époque, sa position n’est pas enviable du tout. Elle est tout au bas de l’échelle sociale, comme l’étranger que l’on pointe du doigt, et que l’on exploite sans vergogne…

Jésus dit qu’elle connaît son besoin, elle connaît son urgence et elle sait exactement où aller et à qui s’adresser pour que son besoin soit satisfait. En fin de compte, le fait qu’elle aille souvent à la confrontation avec le juge corrompu, qu’elle insiste pour se faire entendre, tout cela renforce sa propre idée de qui elle est et de quoi elle parle. Malgré des sentiments de mener une bataille perdue d’avance, de poursuivre une cause perdue, elle n’abandonne pas. Elle persiste, avec courage.

Lorsque Jésus dit qu’il faut toujours prier et ne pas se décourager, il laisse entendre que la prière est aussi difficile que cette lutte inégale de la veuve contre le juge corrompu. Et donc cela demande du courage d’oser revenir à la charge. C’est un travail qui commence d’abord en soi-même : aborder mes lourdeurs, mes erreurs, mes amertumes. Et donc comment reformuler ma demande ? Ce travail intérieur aboutit aussi à préciser mon réel objectif, et où je me situe sur ce chemin, et donc encourage la reprise de ma foi en Dieu. 

Car le seul pouvoir de cette veuve impertinente est de revenir, jour après jour, se montrer à la porte du juge et lui faire connaître son attente, ce dont elle a besoin. Cette persévérance dans sa lutte contre l’injustice du système, Jésus la conçoit comme le courage persévérant dans la prière, au début de la parabole. Et après l’avoir racontée, Jésus pose cette question déroutante, question qui interpelle notre cheminement intérieur, notre objectif de vie : il demande : Vais-je trouver la foi sur la terre ? 

C’est-à-dire, trouverai-je des hommes et des femmes comme la veuve gênante ? Vais-je trouver une telle intensité de courage ? Une telle ténacité dans la volonté ? Un tel courage face aux vents contraires ?

Jésus éclaire donc la question de la prière persévérante avec la question de la foi. Elles sont comme les 2 faces d’une même pièce. Et comme toute pièce de monnaie, chacun peut l’enfouir dans la terre ou travailler avec pour la faire fructifier, avec courage et persévérance. 

Prions.

Seigneur, les bancs vides interrogent notre témoignage, notre persévérance, nos paroles partagées à celles et ceux qui ne sont pas là. Renouvelle en nous le courage de la prière, le courage du témoignage, la conviction du chemin sur lequel nous marchons, et la foi en ton amour juste. Amen

Version PDF à télécharger

Contact