11 février 2024 : Jésus en colère ?

Prédication du 21/01/2024 par le pasteur Marc LABARTHE

Marc 1, 39 à 45

traduction adaptée : Lecture :         Et Jésus se rendit dans toute la Galilée, proclamant le message dans leurs synagogues et chassant les démons. 40 Un lépreux vient à lui et, se mettant à genoux, il le supplie : Si tu le veux, tu peux me rendre pur. 41 Bouleversé, il tendit la main, le toucha et dit : Je le veux, sois pur. 42 Aussitôt la lèpre le quitta ; il était pur. 43 Et s’emportant contre lui, il le chassa aussitôt 44 et lui dit : Garde-toi de rien dire à personne, mais va te montrer au prêtre, et présente pour ta purification ce que Moïse a prescrit ; ce sera pour eux un témoignage. 45 Mais lui, une fois parti, se mit à proclamer la chose haut et fort et à répandre la Parole, de sorte qu’il ne pouvait plus entrer ouvertement dans une ville. Il se tenait dehors, dans les lieux déserts, et on venait à lui de toutes parts.

Lorsque vous entendez cette histoire de Jésus dans l’Ev selon Marc, comment la résumeriez-vous en une phrase ? Est-ce que vous commencez par dire “Jésus a guéri…” ou bien “un lépreux rencontre Jésus et…”, ou bien “le miracle de la guérison…”, ou bien “Jésus se fâche”… ?  

Pour vous aider, écoutez encore une fois : Lecture DEUX

Maintenant, votre résumé en une phrase de cette histoire courte : Dites votre phrase à votre voisin – et écoutez celle qu’il vous dit…

3 exemples différents à haute voix

Nous avons tous entendu l’histoire, nous la connaissions déjà, et pourtant, nous mettons l’accent de façon différente pour résumer ce qui nous semble important dans ce passage. 

Quelle serait donc la parole que Dieu nous adresse ce jour ? l’accent des uns et des autres permet de dire que la parole de Dieu s’adresse à chacun selon son besoin et son parcours, et qu’il n’y a pas d’interprétation définitive et unique pour ce texte, comme pour la plupart des autres.

J’aimerai vous laisser avec quelques pistes de réflexion, afin que l’Esprit de Dieu travaille en chacun de nous pour nous conduire, en tant que communauté, vers un témoignage aux diverses facettes, et qui révèle ainsi la compassion multiple de Dieu pour nous.

Jésus : il se déplace en Galilée, d’un village à l’autre, prêchant l’Evangile d’une synagogue à l’autre, et chassant les démons. Ça paraît simple, schéma d’un guérisseur-prophète qui se fait une clientèle. Mais une fois, en présence d’un malade de lèpre, il est habité par 2 émotions contraires, que certaines bibles indiquent dans leurs notes: Devant l’homme, il est ému de compassion ou bien ému de colère – les mss anciens divergent. Puis, après avoir touché le malade, il est saisi d’un grand dégoût ou grosse irritation, et il le chasse hors de là, il l’expulse – comme lors d’un exorcisme, avec ordre de se taire. 

Marc décrit Jésus capable de vivre des émotions intenses. Les émotions extrêmes se rejoignent dit-on. Nous qui taisons nos émotions quant on vient au temple, pouvons-nous entendre ce que veulent dire ces réactions émotionnelles de Jésus ? Son ambivalence puis sa rude colère et son exigeance comportementale envers l’ex-malade… En quoi cela interpelle notre “sainte pudeur” en Eglise, et nous rejoint dans nos réactions face à quelqu’un qui nous dérange ? 

Un lépreux se pointe sur le chemin, peut-être entre 2 villages, il intercepte Jésus et met son corps en travers de la route, à genoux. Sa lèpre, ce n’est pas d’abord le bacille de Hansen, mais toute maladie de la peau, psoriasis ou acné prononcé. Les scribes ont dénombré jusqu’à 72 affections différentes définies comme la lèpre. Et quand le prêtre a dit lèpre, c’est la lèpre, et la Torah définit la conséquence : le malade portera des vêtements déchirés et les cheveux hirsutes. Il couvrira sa lèvre supérieure et criera : « Impur ! Impur !” Il habitera seul, hors du camp.(Lv13.45). Etre lépreux, c’est être intouchable. Quelles analogies pouvons-nous faire avec notre actualité ? A quels moments suis-je hors de toute relations, exclu parce que qualifié de lépreux ? Ou bien, qui est-ce que je considère comme infréquentable autour de moi ? que je ne salue pas, ou méprise, ou évite ?

Or lui-même, ce lépreux rompt avec toutes les règles sociales, religieuses et de santé publique en s’arrêtant sur la route de Jésus. Il est passible de lapidation. Et une fois chassé de là par Jésus, il refuse de se taire, et il propage son histoire partout. En fait-il sa source de revenus ? En tout cas, Mc dit qu’il en subit les conséquences, en ne pouvant plus entrer dans les villages, bien que guéri (v45). Voyez-vous, Marc utilise le pronom il, sans indiquer l’origine, l’exmalade ou Jésus. Mc vient de citer l’exlépreux et il proclame la parole et il ne peut plus entrer en ville et il se tient dehors dans les déserts. C’est peut-être Jésus, c’est tout aussi bien l’ex-lépreux. Et suivant le sujet que nous souhaitons privilégier, le sens du message est différent, mais il est porteur de l’Evangile parce qu’il vient toucher d’autres points de notre vie. Si c’est Jésus qui doit rester dans le désert, qu’est-ce que ça dit de son ministère ? Si c’est l’exlépreux qui attire les foules, que peut faire Jésus ?

• Dans cette rencontre décidée et provoquée par le lépreux, Jésus est bouleversé : pitié et colère se mêlent en lui, lorsque le lépreux implore sa guérison, car sa renommmée de guérisseur le précède. Compassion pour l’homme solitaire, et colère contre le système religieux et social qui l’exclut, au point que Jésus brise la solitude et déchire lui aussi les règles en touchant l’homme. C’est une lecture. Mais c’est aussi compassion pour l’homme et colère contre le mal qui l’habite ou l’enferme dans son orgueil, puisque Jésus s’exprime ensuite avec irritation contre une attitude négative que pourrait prendre l’homme – et qu’il a quand même choisit de prendre, tout comme il avait choisi d’intercepter Jésus. 

Mais là aussi, notre lecture peut considérer que Jésus est en colère parce qu’il pressent que le lépreux guéri va réussir à s’approprier une partie de la notoriété de Jésus, au risque de rester solitaire et hors la vie sociale habituelle, attirant des foules dans le désert, mais pour quel Evangile au final ?

Ou alors, Jésus laisse exploser sa colère contre cet homme tellement marginal avec la loi et les règles sociales, parce qu’il pressent qu’à cause de cet homme, il sera empêché de continuer ses visites de village en village et devra rester dans la campagne…

Ou encore… à suivre !

Après ces quelques éclairages, comment serait votre phrase qui résume cette histoire ? 

 

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